It’s lonely at the centre of the earth

• Année de publication: 2024
• Éditeur : Hi Comics (Image comics pour la VO)
• Tomes : One Shot
• Nombre de pages : 200 pages
• Autrice : Zoe Thorogood

Avertissement : Cette BD et donc cette critique parle de suicide et d’automutilation.

De quoi ça parle?

Zoe Thorogood est une jeune autrice de BD considérée comme le « Futur des Comics » par le milieu. Nous allons suivre son quotidien et sa lutte contre une dépression et un mal-être qui l’habitent depuis toujours

Et alors, t’as aimé?

Sick sad world

J’avais entendu beaucoup de bien sur l’autrice Zoe Thorogood et le titre en question a reçu deux nominations aux Eisner Awards, l’équivalent des Oscar pour les comics. Un peu rebuté par le prix de 27,90€ de l’édition papier et le message d’avertissement sur le suicide qui ouvrait la BD, je me suis tourné vers l’édition numérique à moins de 10€.

Zoe Thorogood a réalisé une œuvre autobiographique dans laquelle elle semble se livrer totalement. Elle ne cache rien de ses doutes, de ses peurs et de cette dépression qui l’accompagne tel un ami imaginaire représentait sous les traits aussi mignons qu’inquiétants du monstre Happy au fil des pages. Et devant une œuvre aussi personnelle et touchante, il m’est difficile d’en faire une critique qui ne me paraissent pas vide de sens. Mais, on va quand même essayer puisque vous avez pris la peine de me lire jusque-là! Et, j’aimerais aussi vous donner envie d’ouvrir les pages de cette BD qui est d’un point de vue formel un véritable tour de force. En effet, Thorogood n’hésite pas à casser les codes, modifier les représentations visuelles pour appuyer son propos. On retrouve ainsi des dialogues entre différents avatars de l’artiste, chacun représentant une facette ou un moment de vie de l’autrice.Elle brise fréquemment le quatrième mur, transformant les cases de BD en une pièce de théâtre où le personnage de l’autrice donne une représentation d’une scène marquante de sa vie. D’un point de vue formel, on est sans cesse bousculé, le récit s’interrompant brutalement, puis recommençant à zéro jusqu’à que l’autrice trouve comment aborder ce récit d’une jeune femme à l’aube d’un grand succès, mais qui s’est toujours senti en marge et solitaire.

Le récit est parfois très dur et on tremble souvent pour l’autrice qui exprime un mal-être total. Fort heureusement, l’autodérision salvatrice est également présente, permettant de relâcher la pression et de rendre l’ensemble à la fois supportable et même amusant. C’est un récit très fort où l’autrice se met à nu et montre ses fêlures. Si vous êtes, vous aussi, atteint de dépression ou avait déjà eu des pulsions suicidaires, je saurais vous dire si ce livre vous aidera ou si au contraire sera une véritable épreuve à lire. Je trouve que c’est important que ce genre de récit soit réalisé et permette de parler de santé mentale sans en faire un récit inspirant et motivant hors sol et culpabilisant. On assiste ici, tout simplement, à six mois dans la vie d’une personne dépressive et si la fin semble apporter une certaine résolution, ce n’est pas non plus un happy end. It’s lonely at the centre of the earth est une œuvre puissante qui exploite pleinement les possibilités du médium de la bande dessinée. Après Immortal sergeant, c’est une nouvelle très belle publication de Hi Comics mais dont, une nouvelle fois, le prix élevé, pourra en rebuter beaucoup. Quant à Zoe Thorogood, elle se révèle effectivement être une autrice à suivre attentivement dans les années à venir. Je suis d’ailleurs très curieux de découvrir son travail sur le spin-off de la série Hack/Slash, qui nous plongeait dans les aventures d’une gothique en mini-jupe qui tatanait des tueurs en série et autres bogey men! Bref, de la très bonne série B à mille lieux de It’s lonely at the centre of the earth.