Small thing like these
De quoi ça parle?
Un père de famille est mis face à la réalité des couvents irlandais et au traitement qu’ils réservent aux adolescentes. En plein cas de conscience, tout cela fait aussi remonter des souvenirs d’enfance.
Et alors, t’as aimé ?
Bergères égarées
Je cherchais un film à aller voir au cinéma pour profiter d’une journée de libre et il n’y avait rien qui me tapait spécialement dans l’œil. Alors, je me suis dirigé vers Small things like these. Principalement, car il y avait Cillian Murphy en premier rôle. Bien m’en a pris. Le film aborde une affaire qui a secoué l’Irlande et l’Église catholique. Pendant des dizaines d’années, des adolescentes enceintes ont été enfermées de force dans des couvents catholiques et exploitées dans les blanchisseries de l’église. Les nouveau-nés sont soit morts de malnutrition, soit ont été soumis à l’adoption contre le consentement des mères et avec la complicité de l’État. Tout ceci ne s’est arrêté qu’en 1996 ! Le film se passe dans les années 50, donc bien avant que tout ça n’éclate au grand jour et prenne fin.
En regardant ce film, inutile d’attendre un récit héroïque et galvanisant d’un homme seul contre tous qui mettra à bas tout un système cruel et pervers. Cillian Murphy interprète un simple charbonnier. Il effectue ses livraisons journalières aux quatre-coins de la campagne irlandaise avant de rentrer auprès de sa femme et de ses cinq filles. Son petit train-train quotidien va être bouleversé quand il assistera à l’internement de force d’une adolescente au couvent local. Cette scène choquante va le hanter et le faire replonger dans son passé. Pendant 1 h 30, on observera les tourments de ce père de famille entouré d’une famille aimante. Prendra-t-il le risque de tout perdre pour sauver ces filles ? Très peu démonstratif et explicatif, le film est très silencieux et chiche en effets chocs. Il mise tout sur l’interprétation de ses acteurs et de sa mise en scène discrète, mais réfléchie. On assiste ici à une brillante performance de Murphy dans ce rôle de personnage taiseux. On sent à travers son regard dans le vide, sa respiration, les questionnements et le bouillonnement qui l’habitent. C’est une performance tout en retenue, mais marquante. Alternant présent et scènes du passé qui se répondent, le réalisateur ne nous offrira pas de grandes colères, des envolées lyriques ou de grandes révélations. Tout est dans le non-dit, les petites phrases qui permettent au spectateur de tirer lui-même les conclusions sur le passé du héros. À noter quand même une scène glaçante entre Murphy et la révérende mère interprétée par Emily Watson, pleine de sous-entendus menaçants proférés avec le sourire, mais le regard froid. Car la puissance des sœurs est grande dans cette Irlande rurale, elles ont la main mise sur l’éducation des jeunes filles et affronter l’église, c’est le risque de devenir un paria dans sa ville.
Small things like these est un film brillant qui nous rappelle que le cinéma n’est pas que bruit et fureur. Le silence et les images sont parfois bien suffisantes pour transmettre l’émotion et mener le récit. Tim Mielants, réalisateur belge, m’a vraiment séduit avec sa réalisation discrète mais travaillée. Sans plan spectaculaire à la Park-Chan Wook ou de long monologue à la Tarantino, sa composition des scènes est impeccable et travaillée donnant de très belles images, son utilisation du flou à travers les vitres permet de conférer un petit côté irréel à certaines scènes familiales qui contrastent celles au couvent où règnent la froideur et la noirceur. Petit film indépendant, il mérite que vous lui offriez sa chance.