Blanc autour

• Année de publication: 2020
• Éditeur : Dargaud
• Tomes : one-shot
• Nombre de pages : 140 pages
• Scénariste: Wilfrid Lupano
• Dessinateur: Stéphane Fert

De quoi ça parle?

En 1832, une jeune professeur décide d’accueillir des élèves noires dans son école. 30 avant l’abolition de l’esclavage, les Blancs de la région ne sont pas vraiment ravis.

Et alors, t’as aimé

Black education matters

L’histoire des droits des Noirs aux Etats-Unis est une longue et sombre série d’évènement tragiques mais surtout de démonstration de courage d’anonymes qui ont lutté et luttent encore pour être tout simplement traités sur un pied d’égalité avec les Blancs. Certains anonymes sont devenus célèbres et ont marqué le monde entier comme Rosa Parks qui refuse de céder sa place dans un bus à un Blanc ou encore les 9 étudiants noirs du lycée de Little Rock pour qui on a du faire intervenir l’armée afin qu’ils puissent se rendre en cours. Et c’est justement une autre lutte pour l’accès à l’éducation qu’ont décidé de nous raconter Lupano et Fert. Je n’en avais personnellement jamais entendu parler.

Le dessin de Fert peut interroger au premier abord quand on découvre sa magnifique couverture pleine de légèreté, de douceur et de poésie. En effet, ce n’est pas vraiment le genre de dessin qu’on s’attend à découvrir pour illustrer une histoire sur le racisme et la ségrégation. Et pourtant, c’est un choix parfait car il rend encore plus fort le contraste entre ces jeunes filles qui veulent simplement s’instruire et la violence qu’elles vont devoir affronter. J’ai beaucoup aimé la palette de couleurs rose et bleuté choisit par l’artiste qui participe à cette douceur et cette poésie qui parcourent de nombreuses séquences à l’école ou dans les bois. Les élèves sont toutes facilement identifiables que ce soit par leur caractère, leur morphologie ou leur coiffure. La beauté des héroïnes contraste avec la laideur des Blancs haineux et effrayés comme si le visage était le reflet de leur âme. Je ne connaissais pas Fert, mais je compte bien en découvrir plus sur cet artiste qui possède un style qui me touche vraiment.

Sortie en 2020, cette BD résonne forcément avec les évènements Black Lives Matter de l’été et on ne peut s’empêcher de s’interroger sur notre époque et le racisme qui gangrène encore nos sociétés. Mais Blanc autour ne se contente pas de parler de la ségrégation et du racisme. En effet Lupano et Fert évoquent également des problématiques féministes, l’importance de l’éducation pour l’émancipation. C’est une ode à l’école et l’accès à la connaissance qui est salutaire dans cette époque où l’enseignement et les passeurs de savoir ont rarement été aussi maltraités. Cet enjeu est d’ailleurs développé très finement tout au long du récit, car peu à peu on comprend peu à peu quelles sont les motivations des Blancs pour lutter contre cette école pour Noires. On résume bien souvent le racisme à de la bêtise crasse, mais on découvre que c’est au contraire un choix mûrement réfléchi et dicté par la peur de voir disparaître le confortable statu quo. Mais que je vous rassure, les auteurs ne tombent pas dans le piège du récit barbant et didactique. Le récit se déroule avec une étonnante fluidité sans jamais chercher à asséner son propos en étant trop didactique. Et il arrive à proposer de très jolis moments plein d’humour et de légèreté car même si ces élèves vivent des moment difficiles, ce sont aussi des gamines qui ont envie de s’amuser.

Blanc Autour est une nouvelle réussite de Lupano qui sait décidément bien s’entourer. Je vous conseille vivement sa lecture car c’est une BD aussi belle qu’intelligente qui vous fera découvrir un évènement plutôt méconnu de l’histoire américaine.